Ciné-rencontre au cinéma Le Balzac de Château-Renault : l'autisme vu à travers le film de Lola Doillon "Différente"
- Admin
- 30 juin
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 7 jours

Lorsque l'on évoque l'autisme, il vient tout de suite à l'esprit l'image d'un enfant, d'un garçon en particulier.
Depuis plusieurs années, la question de l'autisme chez les filles, puis chez les femmes s'est développée et la recherche scientifique s'est penchée sur le sujet en soulevant la problématique du diagnostic chez les filles et les femmes, faisant émerger des différences concernant l'expression des particularités de l'autisme. Parmi ces différences, on peut noter :
Des difficultés sociales moins visibles (masquées mais bien présentes)
Des compétences communicationnelles (verbales, gestuelles) plus efficientes
Des intérêts spécifiques plus classiques et moins restreints
Des stéréotypies plus discrètes
Souvent une plus grande anxiété
Des risques plus élevés d'être victime d'abus sexuels
Aujourd'hui, il est admis que la prévalence de l'autisme chez les femmes a été sous-évaluée.
Le sexe ratio serait de 3 ou 4 garçons pour 1 fille.
À l'occasion de la sortie du film Différente de Lola Doillon, le cinéma associatif Le Balzac de Château-Renault a programmé une soirée ciné-rencontre le jeudi 26 juin pour laquelle j'ai été invitée à co-animer un débat après la projection du film, aux côtés de 3 jeunes autistes du GEM TSA 37, Qays, Jamilia et Sarah et de Cyril Hanicotte, vice-président du cinéma associatif.

Nous avions choisi, dans un premier temps, de nous appuyer sur certaines scènes emblématiques du film pour parler de l'autisme.
Ainsi, plusieurs éléments du film viennent illustrer de façon tout à fait pertinente comment l'autisme est à l'origine d'une autre perception du monde. En voici quelques unes :
Les relations interpersonnelles de Katia, l'héroïne du film, sont souvent basées sur des malentendus : avec Fred, son compagnon, avant son diagnostic, avec le "dragueur" lors d'une soirée, avec ses collègues de travail, avec son patron par exemple ;
Son mode de perception sensorielle particulier rend les environnements non adaptés, voire oppressants ;
Son perfectionnisme et sa sous-estimation de ses propres capacités : lors de la scène de l'accident du vieux Monsieur au restaurant où elle s'en veut de "ne pas avoir fait assez" ou lors de sa conversation autour des langues où elle minimise ses connaissances ;
L'épuisement de Katia du fait de sa sur-adaptation constante (invisible pour son entourage) aux environnements et contextes ;
Son soulagement après l'annonce de son diagnostic, mais l'étourdissement ensuite face à l'incompréhension de son entourage : son compagnon tout d'abord, puis sa mère et les autres (amis de Fred, collègues de travail) ;
Le difficile choix de révéler ou non son diagnostic au risque d'être confrontée à de l'incompréhension ou du déni ;
Son besoin constant de précision et son attachement à la justesse et à l'anticipation : le brossage des dents doit durer 3 minutes et demie, le jour de l'arrivée de sa mère doit être précis ;
Son anxiété généralisée face à sa difficile interprétation du monde et la nécessité de se sur-adapter.
Deux scènes du film m'ont semblé complémentaires et éclairantes :
La balade en bateau avec Fred : souhaitant faire plaisir à Katia, Fred l'emmène faire un tour sur son bateau. Rien n'a été anticipé (c'est une "surprise"). Au début, cela se passe plutôt bien, mais, pensant bien faire, Fred accélère soudainement la vitesse du moteur qui fait un bruit assourdissant. Soumise à de nombreux stimuli et à une surcharge sensorielle (la vitesse, le bruit, la non maîtrise des événements), Katia, ne pouvant fuir, se recroqueville sur elle-même pour tenter d'échapper à cette surcharge, en vain. Cette scène illustre tout ce qu'il ne faut pas faire et qui n'est pas du tout adapté ;
La scène finale de la fête sur le toit de l'immeuble, où tout a été au contraire préparé, réfléchi et anticipé, avec des ajustements pensés pour que Katia se sente plus à l'aise et participe à l'événement, illustre ce qu'il est juste de mettre en œuvre : Katia a été associée à la préparation de la fête (elle en connaît donc le déroulement) et Fred et ses amis sont attentifs à ce qu'elle vive le moment de façon sereine, en lui apportant un soutien approprié.
A travers l’analyse des scènes représentatives du film, les témoignages de parcours de vie présentés successivement par Qays, Jamilia et Sarah et les échanges avec le public, nous espérons avoir favorisé une meilleure compréhension des spécificités de l’autisme à l'occasion de la projection de ce film..
Le film Différente, par son traitement subtile de la thématique de l'autisme et de son diagnostic à l'âge adulte, contribue à sensibiliser et à informer avec justesse sur ce trouble du neuro-développement pour qu'il soit mieux compris et accepté.

Comments